Al Qaïda, en enrôlant le GSPC algérien sous sa bannière, menace la France et cherche à étendre son influence en Europe grâce à des réseaux constitués de longue date.
"Il ne s'agit pas de baisser la garde, il y a bien une situation de risque" terroriste en France, a déclaré jeudi Dominique de Villepin à Amiens. Cela "doit évidemment nous conduire en permanence à adapter nos dispositifs". C'est ce que nous faisons avec le ministre d'Etat, ministre de l'Intérieur" Nicolas Sarkozy, a ajouté le Premier ministre.
Dans un message mis en ligne à l'occasion du cinquième anniversaire des attentats du 11 septembre 2001, le numéro deux de l'organisation terroriste Al Qaïda, l'égyptien Ayman Al-Zawahiri, appelle le Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC) à "devenir une épine dans la gorge des croisés américains et français et de leurs alliés.
Que ce ralliement "soit source de dépit, de tristesse et de chagrin pour les apostats (du régime algérien), fils traîtres de la France. Nous prions Dieu pour que nos frères du GSPC réussissent à frapper les principaux membres de la coalition croisée, et plus particulièrement leur vieux leader, l'Amérique vicieuse", a-t-il ajouté.
Dans un communiqué mis en ligne jeudi, le GSPC a renouvelé son allégeance à Oussama ben Laden, assurant: "nos soldats sont à ses ordres pour qu'il frappe par notre entremise qui il voudra et partout où il voudra".
Le GSPC avait depuis plusieurs années fait des offres de service à Al Qaïda, mais c'est la première fois que le mouvement d'Oussama ben Laden les accepte sans réserve, explique Alain Chouet, ancien chef du service Renseignements de sécurité à la DGSE.
"Al Qaïda se méfiait traditionnellement des Algériens, qui ont la réputation d'être très infiltrés par les services d'Alger. Mais son problème c'est qu'elle n'a plus de grosse marge de manoeuvre. Elle a de moins en moins de capacités opérationnelles dans le monde. Donc si des Algériens veulent passer à l'action et qu'on peut les mettre sous drapeau Al Qaïda, c'est pas plus mal".
Pour Anne Guidicelli, qui dirige la société de conseil spécialisée "Terrorisc", "le GSPC avait tendu des perches, il y avait des réticences de la part d'Al Qaïda. L'an dernier, dans un autre message, Al Zawahiri avait même dit: +Méfiez-vous des Algériens+".
"Mais les choses ont évolué: maintenant, il officialise un lien organique, ajoute-t-elle. Il a utilisé un terme arabe qui veut dire +intégré+. Le GSPC peut désormais disposer des moyens de l'organisation. Mais c'est surtout Al Qaïda qui a besoin des réseaux algériens en Europe (...) Leur ligne, c'est que plus que jamais il faut s'unir. Il demande aux autres mouvements de suivre l'exemple du GSPC, c'est un appel au rassemblement".
Pour un responsable français de la lutte anti-terroriste, s'exprimant de façon anonyme, "ces messages ont pour but de trouver un motif mobilisateur, de motiver les troupes ... le moindre prétexte est bon. La France est bien sûr visée, d'autant qu'elle est présente en Afghanistan et au Liban".
Une source proche des services de renseignements estime que "ce message officialise le fait que le GSPC est un bras armé d'Al Qaïda pour frapper en France". "Ce qui est inquiétant, c'est que la voix des chefs d'Al Qaïda a un poids important auprès des djihadistes. Cela peut précipiter le passage à l'acte, voire l'auto-allumage. Donc cela renforce la menace et l'inquiétude".
Le GSPC a été fondé en Algérie en 1998 par des dissidents du Groupe islamique armé (GIA). Affaibli après des années de répression dans son pays d'origine, il dispose, selon les services de renseignements occidentaux, de nombreux relais et sympathisants en Europe.